Millepertuis perforé (Hypericum perforatum L.)
HYPERICACEES
Photos Millepertuis
Voir Plantes photosensibilisantes
Noms vernaculaires :
Millepertuis commun, millepertuis officinal, herbe de la Saint-Jean, herbe à mille trous,
herbe percée, herbe aux piqûres, chasse-diable, trucheron jaune, trascalan
perforé, crugie [18,24,27,31,32,33,36].
Nom anglais : Saint John’s wort, herb john, pennyjohn, klamath weed, tipton weed, eolaweed,
goat weed, goats beard, amber, raisin rose, commock [2,16,24].
Description botanique :
Le millepertuis est une plante vivace glabre dont la pérennité est assurée par un
rhizome et qui atteint 20 à 100 cm de hauteur.
La tige est dressée, ramifiée, rigide et possède deux côtes saillantes [2,18,24,32,36].
Des anneaux noirs sont présents au niveau des noeuds [2].
Les feuilles sont opposées, ovales à linéaires, sessiles, entières et marquées de
ponctuations translucides [18,22,24,32,36].
Les fleurs possèdent cinq pétales jaune or avec de petits points noirs en bordure, de
18 à 22 mm de long [2,18,22,24,32,36]. Elles sont disposées en grappes corymbiformes et
leurs cinq sépales verts sont lancéolés et acuminés [2,22,24,27,32,36]..
Le fruit est une petite capsule à trois loges s’ouvrant par trois valves pour libérer de
nombreuses graines [2,18,24]. Celles-ci sont marron foncé, cylindriques et possèdent une
petite pointe à chaque extrémité. Elles mesurent environ 1 mm de long et portent de
nombreuses petites dépressions à leur surface [2].
Biotope :
Le millepertuis est commun en France sauf dans une partie des Alpes et des Pyrénées,
il est également rare dans le midi méditerranéen [32,36]. Il peuple les chemins forestiers, les
lisières de forêt, les clairières, les champs, les prairies et le bord des routes [2,18,32,36]. Il
affectionne les sols secs à frais et supporte des sols sablonneux ou infertiles [2,36].
Période de floraison :
Le millepertuis fleurit de juin à septembre [2,18,24,32,36].
Biologie :
Les petites ponctuations translucides visibles sur les feuilles lorsqu’on les met devant
une lumière sont de petites glandes dépourvues de chlorophylle qui contiennent une substance
huileuse [16,22,24,27,31,36].
Les fleurs contiennent un colorant jaune soluble dans l’eau et un colorant rouge soluble
dans l’huile [31].
Parties toxiques de la plante :
Toute la plante est toxique (en particulier les fleurs) et la toxicité est conservée après
dessiccation [22,24,27].
Principes toxiques :
Le millepertuis contient de l’hypéricine qui est un pigment fluorescent dérivé de la
naphthodianthrone, rouge en milieu acide et vert en milieu alcalin, qui possède des propriétés
photosensibilisantes par ingestion [2,16,24,27,33].
Il contient également des huiles essentielles, des tanins et d’autres substances
(xanthones, hyperforine, etc.) qui ne sont pas impliqués dans sa toxicité [16].
Mode d’action :
L’hypericine n’est pas dénaturée par la digestion, elle est absorbée et passe dans le
foie où elle ne cause pas de lésions. Elle gagne ensuite la circulation générale et les structures
cutanées. Combinée à l’oxygène, elle est alors responsable d’une réaction de
photosensibilisation primaire. [2]
Dose toxique :
La dose toxique est de :
- 100g de plante par jour pendant 1 à 3 semaines chez les ovins [24]
- Ou 5% du poids vif en plante fraîche chez les ovins [2]
- 1 à 5% du poids vif en plante fraîche chez les bovins [2,24].
Circonstances d’intoxication :
Les appels concernant le millepertuis représentent 0,4% des appels de toxicologie
végétale pour les ruminants au CNITV (0,3% des appels pour les bovins, 1,1% pour les ovins et
0,2% pour les caprins).
Graph.72. Répartition des appels concernant le millepertuis par espèce (données du CNITV : 16 appels)
Cette intoxication concerne principalement les bovins et les ovins [27]. Sur les 16
appels au CNITV concernant le millepertuis chez les ruminants, 50% impliquent les bovins,
44% impliquent les ovins et seulement 6% impliquent les caprins.
Elle survient lors de la consommation de la plante fraîche dans les pâturages ou par
ingestion de fourrages contaminés et après une exposition de l’animal au soleil [16,27,33]. Elle
touche plus particulièrement les animaux au pelage clair et les jeunes ovins sont plus sensibles
que les adultes [16,22]. L’hypéricine passe dans le lait et peut ainsi être responsable
d’intoxication chez le jeune sous la mère [22].
Graph.73. Répartition annuelle des appels concernant le millepertuis (données du CNITV : 16 appels)
Les appels concernant le millepertuis sont répartis sur trois périodes : de février à
avril et en octobre-novembre, ce qui peut correspondre à la période de distribution hivernale
de fourrages contaminés, et enfin de juin à août (avec un maximum en juin), ce qui correspond
à la période de floraison de la plante et à sa consommation possible dans les pâtures.
Signes cliniques :
L’ingestion de millepertuis est responsable d’une photosensibilisation primaire
(hypéricisme) chez les animaux exposés aux rayonnements solaires après 48 heures à 21 jours
de consommation :
- Signes généraux : inquiétude, prostration ou agitation chez les ovins,
amaigrissement, hyperthermie en particulier chez les ovins, odeur désagréable du
lait, baisse de la production lactée, refus à la mulsion [2,16,22,24,27,33]
- Signes digestifs : anorexie, stomatite et ptyalisme, météorisation, constipation ou
diarrhée, coliques [2,22,24,27,33]
- Signes cardio-vasculaires : tachycardie [2,24]
- Signes respiratoires : polypnée [2,24]
- Signes nerveux : hypersensibilité au toucher, convulsions (lors d’ingestion de
grandes quantités) [2,22,24,27,33]
- Signes cutanés : photodermite exsudative sur peau fine non colorée et dépilée
avec présence de plaques couleur lie de vin très prurigineuses au niveau de la tête,
l’encolure, la région vulvo-anale, la mamelle et les paturons, érythème, oedème et
ulcérations des paupières, des narines, des oreilles et des lèvres, sérosités et
croûtes noires adhérentes, peau dure, craquelée, d’aspect parcheminé,
surinfections voire nécrose ou gangrène du tissu cutané [2,16,22,24,27,33]
- Signes oculaires : photophobie, kératoconjonctivite, blépharite, cécité par
opacification de la cornée [2,22,24,27]
- Troubles métaboliques : ictère [24,27,33].
Graph.74. Signes cliniques et lésions rapportés lors des appels au CNITV concernant le millepertuis
(n=16)
Les signes cliniques les plus fréquemment rapportés lors des appels au CNITV
concernant le millepertuis sont des signes cutanés : oedème et érythème. On signale
également une hypersalivation et une hématurie dans 12,5% des cas.
Signes paracliniques :
On peut constater une hématurie chez les ovins et les caprins. Les analyses
biochimiques montrent une élévation des AlAT, des γGT, des AsAT, de la bilirubine totale, du
sodium et du potassium, accompagnée d’une diminution des protéines totales, de la glycémie et
des phosphatases alcalines. [24]
Evolution :
Elle est en général favorable [22,27]. Les plaies laissées par les excoriations et les
ulcérations ont tendance à cicatriser très lentement avec une repousse des poils qui peut être
très lente à inexistante [22].
Lésions :
On peut observer :
- Une dermite exsudative, des croûtes et des ulcères cutanés [24,27]
- Une dégénérescence hépatique accompagnée d’un ictère dans les cas graves [24,27]
- Un gonflement de la vésicule biliaire [24,27].
Diagnostic différentiel :
Il comprend les intoxications par les autres plantes photosensibilisantes et les causes
de brûlure au premier degré. L’interposition d’une vitre entre l’animal et les rayons du soleil ne
permet pas d’empêcher les lésions de photosensibilisation d’apparaître, ce qui permet de les
différencier d’un coup de soleil. [2]
Diagnostic expérimental :
Il comprend l’examen macroscopique et microscopique du contenu ruminal.
Traitement :
- Mise à l’ombre immédiate et pendant plusieurs jours [24,27,33]
- Perfusion : NaCl glucosé [24]
- Anti-inflammatoires [24,27,33]
- Désinfection, antisepsie et antibiothérapie locale si possible [24,27,33]
- Antibiothérapie préventive [24]
- Facteur PP [24,27]
- Désensibilisateurs, analgésiques : thiosulfate de sodium, hyposulfite de magnésium
[24,27]
- Antihistaminiques : peu efficaces [24,27].
Pronostic :
Le pronostic est bon et la mortalité est rare si l’animal est mis à l’ombre [22,24]. La
convalescence est par contre très lente et les pertes économiques peuvent être importantes
(lait, viande, laine, cuir) [22,24].
D’après les données du CNITV, le taux de morbidité est de 14% chez les bovins (pour
65 bovins exposés) et de 15% chez les ovins (pour 3853 ovins exposés). Le taux de mortalité
atteint 3% chez les bovins et 1% chez les ovins. Le taux de létalité atteint, quant à lui, 22%
chez les bovins et 6% chez les ovins.
Utilisations pharmaceutiques :
Les principes actifs du millepertuis sont utilisés en phytothérapie comme
antidépresseurs (propriétés stimulantes du système nerveux central) [16,24,36].
L’huile de millepertuis (« huile rouge ») obtenue par macération de la plante entière en
début de floraison dans un acide gras, est également utilisée dans le traitement local des
plaies (l’hyperforine ayant des propriétés bactéricides) [16].
Version : 2009