Galéga officinal (Galega officinalis L.)
FABACEES
Photos Galéga
Noms vernaculaires [4, 10, 24, 25, 27, 33] :
Rue des chèvres, herbe aux chèvres, sainfoin d’Espagne, sainfoin d’Amérique, lilas
d’Espagne, faux indigotier, faux indigo, lavanèse, lavanèze, vanèse, vanèze, capraggine.
Nom anglais : goat’s rue.
Description botanique [4, 10, 11, 18, 24, 25, 27]:
Le galéga est une plante herbacée vivace, glabre ou peu poilue, atteignant 60 à 150 cm
de hauteur. Sa racine est pivotante, puissante et souvent profonde.
Les tiges sont minces et dressées, creuses, striées sur leur surface et parfois
rameuses.
Les feuilles sont alternes, composées et imparipennées. Elles comportent neuf à dix-sept
folioles. Les folioles sont oblongues et portent un mucron (pointe fine) à leur extrémité.
La foliole terminale est, par contre, échancrée au sommet. Les stipules, vertes et sagittées,
sont disposées à la base de chaque feuille.
Les fleurs sont blanches à lilas pâle, bleues ou pourpres, souvent bicolores et sont
disposées en grappes à l’aisselle des feuilles qu’elles dépassent largement.
Elles mesurent 10 à 15 mm de long et leur calice comporte cinq dents très fines.
Les fruits se présentent sous la forme d’une gousse cylindrique de 20 à 50 mm de long,
composée de deux valves linéaires se tordant à maturité et contenant deux à six petites
graines brunes.
Il faut se méfier de ne pas confondre le galéga avec le sainfoin cultivé ou la réglisse glabre.
Le sainfoin est plus petit et possède des feuilles comportant 21 à 31 folioles qui sont portées sur
des tiges velues. Ses fleurs sont roses à pourpres et veinées. Les gousses sont très courtes (6-8 mm)
et épineuses sur les bords. Les inflorescences de la réglisse dépassent quant à elles rarement les feuilles.
De plus, ses folioles ne possèdent pas de mucron et sont visqueuses sur leur face inférieure.
Biotope [4, 10, 11, 18, 25] :
Cette plante, considérée comme une adventice, peuple les fossés et les zones humides dans la moitié sud
de la France (de l’Aquitaine aux Pyrénées). Commune dans le midi, elle résiste mal aux grands froids.
Cependant, elle est aussi naturalisée ou subspontanée dans les départements du Centre et de l’Est.
Elle affectionne les sols acides, pauvres en matières organiques, compacts, argileux ou siliceux. Elle est
parfois cultivée en tant que plante d’ornement dans les jardins.
Période de floraison [10, 11, 24, 25, 27] :
Cette plante fleurit de juin à septembre.
Biologie [4, 10, 24, 35]:
Le galéga est résistant à certains herbicides de la famille des triazines, à leurs
métabolites et au glyphosate, il prolifère donc facilement et est difficile à éradiquer.
Il peut être détruit par des herbicides de la famille des aryloxyacides afin de prévenir de
nouvelles intoxications.
Parties toxiques de la plante [10, 24, 25, 27, 35] :
Les principes toxiques sont présents dans toutes les parties aériennes de la plante
pendant la floraison et la formation des fruits. Ils sont par ailleurs présents
en grandes quantités dans la racine durant tout le développement de la plante.
L’ensoleillement et l’humidité augmentent la toxicité de la plante. La dessiccation ne
modifie pas sa toxicité [10,24,25,27,35].
Principes toxiques [4, 10, 11, 24, 25, 27] :
On trouve :
- Des amines alcaloïdiques : galégine et hydroxygalégine. La teneur en galégine est comprise
entre 0,1 et 0,3% (jusqu’à 0,5% dans les racines et les graines).
- Des flavonoïdes : lutéoline et galutéoline qui est un colorant jaune.
- De la péganine ou vasicine.
- De la saponine et des tanins.
Mode d’action [10, 24] :
La galégine et l’hydroxygalégine inhibent l’utilisation de l’énergie respiratoire pour la
synthèse de l’ATP en se fixant par liaison forte sur les phospholipides membranaires. Ils sont
responsables d’une paralysie des centres nerveux, d’une hypotension et d’une hypoglycémie. La
lutéoline et la galutéoline augmentent la résistance capillaire en inhibant l’inactivation de
l’adrénaline.
Dose toxique [10, 11, 24, 25, 27, 33, 35] :
La dose toxique est de :
- 100 g de plante sèche par adulte.
Les doses létales sont de :
- 6 à 12 g de plante fraîche par kg de poids vif (10g/kg suffiraient pour entraîner la
mort d’un mouton).
- 1,5 à 3 g de plante sèche par kg de poids vif.
- Soit 1% du poids vif en plante fraîche ou 0,25% du poids vif en plante sèche.
Il n’y a pas de corrélation entre la dose et l’effet toxique observé et on constate une
grande variation de la sensibilité individuelle au toxique. Certains auteurs citent
l’existence d’un phénomène d’accoutumance et donc de résistance ultérieure à l’intoxication au
galéga mais ce phénomène semble difficile à confirmer du fait de la sensibilité variable à ce
toxique.
Circonstances d’intoxication [4, 10, 24, 25, 27, 33, 35] :
Les appels concernant le galéga représentent 1,4% des appels de toxicologie végétale
pour les ruminants au CNITV (0,9% des appels pour les bovins, 3,8% pour les ovins et 0,9%
pour les caprins). Il s’agit de la quatrième cause d’appel de toxicologie végétale pour les ovins
au CNITV (derrière le thuya, le laurier cerise et les glands).
Graph.46. Répartition des appels concernant le galéga par espèce (données du CNITV : 53 appels)
Selon les données de la bibliographie, cette intoxication concerne quasi exclusivement
les ovins mais, sur les 53 appels au CNITV concernant le galéga chez les ruminants, les bovins
sont aussi fréquemment impliqués que les ovins (respectivement 46 et 45% des appels
concernent ces deux espèces). Les ovins seraient néanmoins plus sensibles à cette intoxication que les bovins
et ces derniers seraient eux-mêmes plus sensibles que les caprins. En effet, il semblerait que les bovins
répugnent à consommer le galéga du fait de son amertume et de son odeur désagréable surtout quand il est fraîchement coupé.
Les jeunes animaux sont également plus sensibles à cette intoxication (comportement
exploratoire et ingestion de grandes quantités).
Cette intoxication intervient surtout au pâturage en période de sécheresse ou de
disette ou par distribution de foin ou d’ensilage contaminé (à partir de 10% de galéga).
Graph.47. Répartition annuelle des appels concernant le galéga (données du CNITV : 53 appels)
Les appels concernant le galéga sont globalement répartis sur toute l’année mais on
constate une légère augmentation de ces derniers durant les mois de décembre à mars, ce qui
correspond à la période de distribution hivernale des fourrages contaminés, ainsi que durant
le mois de septembre qui correspond lui à la fin de la période de floraison de la plante et à la
période de fructification de celle-ci.
Signes cliniques [4, 10, 11, 24, 25, 27, 33, 35] :
Intoxication suraiguë :
- Mort subite.
Intoxication aiguë :
La forme aiguë est à dominante respiratoire, les signes cliniques apparaissent 12 à 48
heures après l’ingestion de la plante :
- Signes généraux : agitation
- Signes digestifs : anorexie, inrumination, hypersalivation
- Signes respiratoires : essoufflement, tachypnée, dyspnée intense avec encolure
tendue et tirage costal, respiration buccale ronflante, jetage spumeux et rosé,
parfois toux quinteuse ou grasse, asphyxie
- Signes cardio-vasculaires : tachycardie, dilatation des veines jugulaires, oedème
de la face, congestion intense des muqueuses oculaires, refroidissement des
extrémités
- Signes nerveux : ataxie, convulsions tétaniformes avec perte d’équilibre et
opisthotonos liées à l’asphyxie
- Troubles de la reproduction : mortalité embryonnaire et avortement possibles.
Graph.48. Signes cliniques et lésions rapportés lors des appels au CNITV concernant le galéga (n=53)
Le signe le plus souvent rapporté au CNITV est la diarrhée (43,4% des cas). La
présence d’un oedème pulmonaire est signalée dans 39,6% cas, une hypersalivation est relevée
dans 15,1%, une hypothermie, une prostration et une cyanose des muqueuses dans 11,3% des
cas.
Evolution [4, 10, 24, 25, 27] :
Selon la quantité ingérée, la mort peut survenir entre quelques minutes à plusieurs
heures après l’apparition des premiers signes. Ainsi, dans la forme suraiguë, la mort peut
survenir en moins d’une heure alors qu’elle peut survenir jusqu’à 48 heures après l’apparition
des signes cliniques dans la forme aiguë. Des cas de mort subite sont signalés dans
41,5% des appels aux CNITV.
En cas de faible consommation, certains animaux peuvent rester asymptomatiques ou
ne présenter qu’un oedème facial et des signes d’indigestion transitoires se résolvant sans
traitement en 5 à 6 jours.
Lésions [4, 10, 11, 24, 27, 35] :
Certaines des lésions observées sont caractéristiques de l’intoxication par le galéga :
- OEdème aigu du poumon avec la présence d’une mousse très abondante à la
section de la trachée et des bronches. L’oedème pulmonaire est signalé dans 39,6% des
appels au CNITV.
- Hydrothorax très important constitué par du liquide citrin et rosé, qui prend très
rapidement en masse après l’ouverture de la cage thoracique. Il est
signalé dans 22,6% des appels au CNITV.
D’autres sont moins fréquemment rencontrées :
- Hémorragies dans le tissu conjonctif sous-cutané
- Pétéchies sous-endocardiques ou endotrachéales
- Congestion hépatique et rénale, hépatite dégénérative suraiguë.
Une hépatite est rapportée dans 17% des appels au CNITV et une néphrite dans
15,1% des appels.
- Congestion du tube digestif ou des méninges
- Présence d’une petite quantité de liquide foncé, jaune orangé, dans la cavité
abdominale
- Léger épanchement péricardique
Une pneumonie est par ailleurs relevée dans 17% des appels au CNITV. Cette lésion,
bien que non citée dans la bibliographie, pourrait éventuellement s’expliquer par une fausse
déglutition chez l’animal en dyspnée intense.
Diagnostic différentiel [10] :
Il devra prendre en compte les causes de mort subite d’origine toxique ou non chez les
ruminants. Ainsi il comprendra :
- L’entérotoxémie : elle est responsable de morts subites en particulier chez les
animaux à l’engrais. Ces animaux présentent alors des lésions digestives très
importantes (congestion, ulcérations et hémorragies digestives, hypertrophie des
ganglions mésentériques).
- La pasteurellose : elle peut provoquer une mort rapide mais non foudroyante. Les
signes respiratoires sont proches de ceux observés lors de l’intoxication par le
galéga avec toutefois en plus de l’hyperthermie, un jetage muco-purulent et des
râles en région pulmonaire crânio-ventrale.
- L’intoxication par le phosphure de zinc, gaz hémolysant et très irritant pour
l’appareil respiratoire.
- L’intoxication par les glands pour laquelle on observe en plus des signes
respiratoires, des signes digestifs et urinaires très prononcés.
- L’intoxication par l’amarante pour laquelle on observe la formation d’un hydrothorax
associée à des signes nerveux (ataxie et parésie).
Diagnostic expérimental [10, 25, 27] :
On peut procéder à l’identification phyto-histologique des débris végétaux contenus
dans le rumen, celle-ci s’avère néanmoins le plus souvent inutile du fait de la rapidité
d’évolution et de l’existence de lésions nécropsiques très évocatrices de cette intoxication.
Traitement [10, 24, 25, 27, 33] :
Toute tentative de traitement est illusoire en raison de la rapidité d’évolution de
l’intoxication. Il convient d’essayer, sur des animaux qui ont apparemment
consommé des quantités plus faibles de la plante :
- Une mise au repos totale
- Un changement d’alimentation
- Des analeptiques cardiaques : caféine, heptaminol
- Des diurétiques : furosémide
- Une perfusion : sérum glucosé isotonique
- Des laxatifs
Certains auteurs conseillent l’administration d’alcool dilué à 25-30° per os.
Pronostic [4, 10, 25] :
Cette intoxication est généralement mortelle. Le taux de mortalité (nombre
d’animaux morts/nombre d’animaux exposés) peut atteindre 50% et le taux de létalité
(nombre d’animaux morts/nombre d’animaux malades) peut quant à lui atteindre 100%.
D’après les données du CNITV, le taux de morbidité atteint 26% chez les bovins (sur
503 bovins exposés), 24% chez les ovins (sur 2598 ovins exposés) et 45% chez les caprins
(sur 111 caprins exposés). Le taux de mortalité s’élève à 20% chez les bovins, 12% chez les
ovins et 11% chez les caprins. Le taux de létalité atteint quant à lui 76% chez les bovins, 51%
chez les ovins et 93% chez les caprins.
Utilisations pharmaceutiques [10] :
Le galéga a autrefois été utilisé pour ses propriétés galactogène (GALACTOGIL®) et
antidiabétique mais les nombreux effets secondaires ont conduits à abandonner son
utilisation [10].