Rhododendrons et Azalées (Rhododendron sp.)

ERICACEES
Photos Rhododendron
Bibliographie : [
2,9,11,16,24,27,33,36]

Noms vernaculaires :
  Rhododendron ferrugineux (Rhododendron ferrugineum L.) :
  Laurier rose des Alpes, rose des Alpes, rosage, rosage des Alpes, romarin sauvage.
  Nom anglais : rhododendron.

  
Rhododendron hérissé (Rhododendron hirsutum L.) :
  Rhododendron cilié, rhododendron pâle.
  Nom anglais : rhododendron.

  
Rhododendron obtusum, Rhododendron indicum et Rhododendron mollis :
  Azalée japonaise, azalée des Indes et azalée de Chine.

Description botanique :
Espèces sauvages :
  On rencontre, en France, le rhododendron ferrugineux (Rhododendron ferrugineum L.)
et le rhododendron cilié (Rhododendron hirsutum L.).
  Le rhododendron ferrugineux est un arbrisseau atteignant 30 à 150 cm de hauteur.
Il possède des feuilles persistantes, ovales (3 à 6 cm de long), coriaces, glabres, qui
sont vert foncé sur leur face supérieure et brun-roux sur leur face inférieure.
Les
fleurs à cinq pétales sont rouge carmin et groupées par six à douze en corymbe. Le
fruit est une capsule ovoïde à cinq valves (déhiscence septicide) renfermant de petites
graines plates et fusiformes.
  Le rhododendron cilié est un arbrisseau atteignant 30 à 120 cm de hauteur [9,36]. Ses
feuilles lancéolées (1 à 4 cm de long) et coriaces, sont persistantes et longuement ciliées sur
leur bord. Les fleurs sont rose-rouge et sont groupées en corymbe par trois à dix [36].

Variétés ornementales :
Le genre Rhododendron comprend, selon les botanistes, les rhododendrons et les
azalées. Les
rhododendrons sont des arbres ou des arbustes possédant des feuilles
semblables à celle du laurier, persistantes ou caduques, alternes et entières. Les fleurs sont
souvent très colorées et disposées le plus souvent au niveau des rameaux terminaux (plus
rarement axillairement). La corolle des fleurs est le plus souvent campanulacée avec 5 lobes.
Le fruit est une capsule brune septicide renfermant de nombreuses et très petites graines.
Les azalées sont en fait des rhododendrons à petites feuilles parfois caduques. On distingue
les azalées japonaises précoces (à petites fleurs et feuilles persistantes) fleurissant en avril
et les azalées de Chine à feuilles caduques qui fleurissent au mois de mai.

Biotope :
Espèces sauvages :
  Elles poussent en montagne (Jura, Vosges, Alpes et Pyrénées) à la limite des forêts et
de la zone des arbres nains (de 1200 à 2500 mètres d’altitude), mais aussi plus bas dans les
prairies. Le rhododendron ferrugineux aime les sols humides et non calcaires alors que
le rhododendron cilié affectionne les sols calcaires. Le rhododendron ferrugineux est
également cultivé à titre ornemental.

Variétés ornementales :
Elles sont très fréquemment rencontrées dans les jardins et affectionnent les sols acides.

Période de floraison :
  Les deux espèces précédemment citées fleurissent de mai à août.

Biologie :
Le rhododendron cilié est protégé en France.

Parties toxiques de la plante :
  Toutes les espèces de rhododendron sont toxiques (y compris les azalées). Toute
la plante est toxique que ce soient les feuilles, les fleurs, le nectar (et donc le miel) ou les
racines. Cependant, la dessiccation diminue sa toxicité.

Principes toxiques :
  Les rhododendrons contiennent des diterpènes toxiques, les grayanotoxines (ou
andromédotoxines). La plante renferme également d’autres glucosides comme l’arbutine et l’éricoline.
Les feuilles sont également riches en tanins.

Mode d’action :
  Les grayanotoxines ont la propriété d’accroître spécifiquement la perméabilité
membranaire aux ions sodium (elles stabilisent les canaux à sodium en position ouverte), ce qui
entraîne la dépolarisation de la plupart des cellules électriquement stimulables. Elles
ont donc un effet curarisant et dépresseur du système nerveux central et des muscles striés,
ainsi qu’une action bradycardisante. Elles agissent également sur les terminaisons
stomacales du nerf vague provoquant des vomissements violents.

Dose toxique :
- DL50 souris (voie parentérale) = 1,28 mg/kg de grayanotoxine I ou 0,91 mg/kg de
grayanotoxine II.
- La dose toxique par ingestion de feuilles fraîches serait de 0,1 à 0,6% du poids vif
chez le mouton et de 0,1% chez la chèvre.
- L’ingestion de 10 feuilles suffirait à entraîner des troubles chez les bovins.

Circonstances d’intoxication :
  Les appels concernant le rhododendron représentent 2,8% des appels de toxicologie
végétale pour les ruminants au CNITV (0,1% des appels pour les bovins, 3% pour les ovins et
15,8% pour les caprins). Il s’agit de la première cause d’appel de toxicologie végétale pour les
caprins.


Graph.96. Répartition des appels concernant le rhododendron par espèce (données du CNITV : 106
appels)

  Cette intoxication concerne surtout les petits ruminants : sur les 106 appels au CNITV
concernant le rhododendron chez les ruminants, 78% impliquent les caprins et 18% les ovins,
seuls 4% concernent les bovins. Les bovins sont moins exposés à ce type d’intoxication que les
caprins ou les ovins de montagne mais y seraient plus sensibles que ces derniers.
  Les herbivores, en particulier les caprins et les ovins, plus rarement les bovins (ou les
ânes) consomment parfois le feuillage des rhododendrons dans les régions où ces espèces
abondent surtout quand les pâturages habituels sont rendus inaccessibles à cause des
conditions météorologiques (en particulier : forte chute de neige). L’intoxication
peut également être due à la consommation de déchets de taille mis à la disposition des
animaux par l’homme.


Graph.97. Répartition annuelle des appels concernant le rhododendron (données du CNITV : 106 appels)
  Les appels concernant le rhododendron sont répartis sur toute l’année.


Signes cliniques :
Forme suraiguë :
  La consommation d’une quantité importante de cette plante peut entraîner une mort
rapide des animaux.

Forme aiguë :
  Les signes cliniques apparaissent dans les heures qui suivent l’ingestion :
- Signes généraux : abattement, signes de souffrance intense avec plaintes et
gémissements en particulier chez les ovins, diminution de la production lactée,
hyperthermie
- Signes digestifs : anorexie, inrumination, ptyalisme, coliques, diarrhée plus ou
moins hémorragique (méléna), jetage alimentaire voire vomissements violents
- Signes nerveux : ataxie, faiblesse musculaire, tremblements, convulsions tonocloniques,
opisthotonos. Les crises sont intermittentes, entrecoupées de phases de
rémission, chacune affaiblissant un peu plus l’animal. En phase terminale, l’animal
est paralysé et sombre dans le coma.
- Signes cardio-vasculaires : cyanose des muqueuses, hypotension, bradycardie ou au
contraire tachycardie et arythmie cardiaque
- Signes respiratoires : dyspnée, tachypnée, toux forte associée à une fausse
déglutition
- Signes oculaires : épiphora.


Graph.98. Signes cliniques et lésions rapportés lors des appels au CNITV concernant le rhododendron
(n=106)

  Les signes digestifs constituent la majeure partie du tableau clinique rapporté lors des
appels au CNITV concernant le rhododendron avec des vomissements (malgré le fait que notre
étude se place chez les ruminants, on parle ici de véritables vomissements et non de simples
régurgitations) dans 50% des cas, de l’hypersalivation dans 38,7% des cas et des coliques
dans 21,7% des cas. Parmi les signes nerveux, de l’ataxie est le plus souvent rapportée (12,3%
des cas). Une prostration et un décubitus sont également fréquemment notés
(respectivement dans 18,9 et 10,4% des cas).

Signes paracliniques :
  On peut noter une augmentation de la créatininémie et des AsAT (Aspartate Amino-
Transférases) suite aux atteintes musculaires, ainsi qu’une anémie et une leucocytose.

Evolution :
  L’évolution peut être fatale en moins de deux jours, dans le cas contraire la rémission
est longue et on observe fréquemment des bronchopneumonies par fausse déglutition. La
mort intervient par paralysie respiratoire (asphyxie).

Lésions :
  Les lésions ne sont pas spécifiques. On observe :
- Une congestion généralisée
- Une pneumonie par fausse déglutition fréquemment
- Une gastro-entérite
- De petites hémorragies disséminées sur les méninges et le tractus digestif
- Plus rarement, une néphrite aiguë ou une dégénérescence hépatique.

Diagnostic différentiel :
  Il comprend les affections et intoxications causant des troubles digestifs majeurs.

Diagnostic expérimental :
  On peut procéder à l’identification phyto-histologique des débris végétaux recueillis
dans le contenu ruminal. La technique de chromatographie sur gel est également
utilisable pour la recherche des grayanotoxines dans le contenu ruminal.

Traitement :
  Avant l’apparition des signes cliniques, on peut réaliser une ruminotomie d’urgence.
  Le traitement médical est symptomatique :
- Charbon végétal activé, huile de paraffine et purgatif salin, pour diminuer
l’absorption et favoriser l’élimination du toxique
- Perfusion
- Pansements digestifs
- Diazépam (VALIUM®) ou barbituriques ou xylazine en cas de troubles nerveux
- Corticoïdes pour lutter contre la douleur
- Antibiothérapie en cas de bronchopneumonie par fausse déglutition
- Analeptiques cardio-respiratoires : doxapram et atropine (0,1 mg/kg IV) ou caféine
pour lutter contre la bradycardie, voire anti-arythmiques si besoin
- Sulfate d’éphédrine (50 à 100 mg IM) chez les caprins et les ovins.

Pronostic :
  Le pronostic reste réservé et la létalité peut être importante. Si l’animal ne
décède pas suite à l’intoxication, la convalescence est longue et entraîne d’importantes pertes
économiques (perte de poids et diminution de la production lactée).
  D’après les données du CNITV, le taux de morbidité atteint 5% chez les bovins (sur
667 bovins exposés), 10% chez les ovins (sur 2556 ovins exposés) et 61% chez les caprins (sur
227 caprins exposés). Le taux de mortalité s’élève à 2% chez les bovins ou les ovins et 3%
chez les caprins. Le taux de létalité atteint quant à lui 30% chez les bovins, 16% chez les
ovins et 4% chez les caprins.